Nous voyez-vous ?

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Lili Vagne a toujours jonglé entre humanitaire et photographie. En 2021, elle a réuni ses deux centres d’intérêt en travaillant avec des jeunes qui venaient d’être reconnus mineurs. Avec un défi particulier, celui de la langue : « Il faut trouver le moyen de communiquer et de partager à travers la photo. » Julie Desbiaux l’a rencontrée pour le deuxième numéro de la revue Chabe ! (toujours en librairie).

« La contrainte était de faire des portraits de mineurs sans qu’on puisse les identifier. J’ai proposé aux participants de prendre les photos puis d’intervenir dessus… ce qui n’était pas tou­jours évident pour eux. » Lors de cet atelier, durant lequel Lili Vagne a fait découvrir aux jeunes l’argentique grâce à une chambre pho­tographique, les participants se sont montrés très réceptifs à la prise de vue. Ils se sont amu­sés à poser, seuls ou à plusieurs. Entre copains, ils se sont lâchés, et rigolaient en prenant les photos. Le plus compliqué, pour la photo­graphe, a été d’expliquer le procédé aux jeunes : pourquoi devaient-ils cacher leur vi­sage ? Comment le faire sans y perdre la nature même de la photo ? La solution de Lili Vagne a été de créer une certaine intimité avec les jeunes au-delà de l’atelier. De développer une relation. « J’étais beaucoup derrière eux pour les aider, leur apprendre. Certains étaient très timides mais curieux. Les jeunes qui viennent d’être recon­nus mineurs ne parlent pas tous très bien français, il faut trouver le moyen de communiquer et de partager à travers la photo. » La barrière de la langue est en effet l’une des principales difficultés que rencontrent les mineurs arrivés dans un pays étran­ger. « En France, il y a une longue partie admi­nistrative qui peut perdre les jeunes », regrette Gwenaël Crenn, présidente du collectif AMIE (Accueil des mineurs isolé.es étranger.es). « Pour la plupart analphabètes, ils se noient dans toutes les démarches à suivre. Souvent, on est obligés de revoir avec eux leur récit, leur parcours de vie, car ils ne sont pas compris par les évalua­teurs. »

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« En attendant d’être reconnus mineurs, les jeunes sont lâchés dans la nature »

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