
Comment se glisser dans l’intimité des plus précaires de l’agglomération lyonnaise sans être voyeur ou même impudique ? Dans la revue
Chabe! (toujours disponible en librairie), Philippe Merchez et Romain Bagnard proposent deux approches pour raconter la vie en squat ou en logement d’urgence. Cette semaine : « The Shelter », une série photographique de Romain Bagnard. Le journaliste Nicolas Delattre l’a rencontré.À la Croix-Rousse, Romain Bagnard a choisi une autre démarche que Philippe Merchez pour suivre l’ancien squat du collège Maurice-Scève pendant 10 mois, avant sa fermeture en octobre 2020 puis sa démolition en 2021. L’artiste a travaillé autour de la notion d’identité et de représentation en prenant les personnes de dos, et les lieux avec un cadrage serré.
« Ceux qui habitaient le squat reconnaissaient les gens de dos, grâce à leur corpulence, à leur coiffure, mais ceux de l’extérieur ne pouvaient pas savoir », souligne- t-il. « Le thème des mineurs isolés, des migrants a beaucoup été abordé. On a souvent une photo avec une narration, une histoire. Moi, j’ai pris le parti de ne rien raconter. » Romain Bagnard ne dévoile rien dans ces photos ; il suggère. On devine la latte apparente d’un lit, un canapé amoché, un trou dans un mur : « C’est la construction d’un langage visuel que seuls les habitants du squat peuvent comprendre. »
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