Iran : « La peur ne suffit plus pour nous réduire au silence »

Plus de 40 jours après le décès de Mahsa Amini et 253 morts plus tard, la révolte en Iran ne tarit pas. Au contraire, elle tient tête au gouvernement répressif et autoritaire du pays. Ce qui provoque vagues de soutien, mobilisations et prises de conscience sur l’ensemble du globe. Auteur et dessinateur, Reza Vassaf a vu l’Iran passer des mains des Occidentaux à celles des mollahs. L’ex-professeur de communication visuelle a quitté l’université d’art et d’architecture de Téhéran pour Lyon en 2006. Doctorant en histoire de l’art à Lyon II, il dresse le portrait du pays où il a vécu 36 ans et expose les rouages du soulèvement qui l’accapare. Propos recueillis par Rachel Andres.

L’Arrière-Cour : La révolte se déroule depuis plus de 40 jours. Le pays a déjà traversé d’autres soulèvements, en 2009 puis en 2019. En quoi celui-ci est-il différent ?

Reza Vassaf : La première mobilisation est politique. En 2009, le peuple se soulève contre les élections truquées qui auraient amené Ahmadinejad, un ultraconservateur, au pouvoir. Par la suite, l’Iran est frappé de plusieurs sanctions internationales. La seconde fois, la mobilisation est de nature économique. En 2015, les accords de Vienne sont signés pendant le mandat de Rohani, un président conservateur et centriste, soutenu par les partis réformistes modérés. Trump balaie cependant du revers de la main la deuxième tentative de désescalade : il retire les États-Unis des accords nucléaires en 2018. Un an plus tard, le prix de l’essence atteint des niveaux exorbitants. Les Iraniens manifestent alors contre l’effritement de leur maigre pouvoir d’achat.

À trois reprises, l’Iran a tenté une désescalade avec l’Occident, particulièrement avec les États-Unis. Et à trois reprises, cela n’a pas fonctionné. Après la collaboration de Mohammad Khatami, président réformiste, avec les Américains lors des guerres d’Afghanistan et d’Irak, George Bush nous inclut dans « l’Axe du mal » en janvier 2002. Un an plus tard, il empêche l’accord nucléaire entre Mohammad Khatami et la troïka européenne de se concrétiser. Par conséquent, le vote conservateur devient majoritaire. Il s’est passé la même chose à la suite des accords de Vienne en 2015. Aujourd’hui, nous connaissons une troisième révolte : celle des femmes, soutenue par les hommes.

 

Comment les revendications féministes se sont-elles développées en Iran, au point de devenir le moteur principal de cette révolution ?

Le slogan « Femme, vie, liberté » que scandent les manifestants traduit un changement mental de la société iranienne en faveur des droits humains. Dès 1981, le voile était obligatoire pour l

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