« La précarité n’abîme pas que le travail, elle nuit aux corps, aux couples, aux familles »

Avant de devenir un économiste vedette parmi les « hétérodoxes », Thomas Porcher a subi la précarité des vacations universitaires. Un pseudo-statut de chargé de cours qui concerne aujourd’hui plus de 160.000 personnes en France. Thomas Porcher est resté enfermé dans cette « trappe à vacations » entre 2006 et 2011, après avoir obtenu son doctorat en économie. Il raconte cette expérience dans Le Vacataire. Une autre façon d’aborder les dégâts que causent les politiques d’austérité. Une interview réalisée par Ariane Denoyel.

L’Arrière-Cour : Comparé à vos autres livres (à part la BD L’économie pour les 99 %), Le Vacataire adopte un autre prisme, plus intime, pour décrire les conséquences de choix politiques dont vous démontrez qu’ils sont délétères mais systématiquement présentés comme inévitables – le fameux TINA, « there is no alternative ». L’expérience d’écriture vous a-t-elle paru très différente ?

Thomas Porcher : Cela n’a pas été évident de me dévoiler, il est en effet plus simple de parler d’austérité de façon théorique que de s’exprimer à la première personne. Mais cela présente le mérite de relier l’expérience vécue à l’analyse académique. C’est d’ailleurs le principe de cette collection « Immersion ». On ne cesse de nous marteler qu’il faut aller encore plus loin dans la diminution des dépenses publiques, alors que toutes les évaluations de ces politiques d’austérité accompagnées de baisse des impôts sur les plus riches et sur les entreprises montrent qu’elles ne marchent pas. Comprendre comment elles dégradent, très concrètement, les conditions de vie et la santé des gens peut permettre de mieux ressentir leur iniquité. Comme dans le film Sorry We Missed You de Ken Loach sur les livreurs des plateformes, j’ai voulu montrer les impacts négatifs sur les corps, les couples, les familles. J’avais tenu un petit journal à l’époque, je l’ai utilisé comme base pour le livre.

 

Très concrètement, comment est-il légal de faire travailler des gens sans régler des cotisations de retraite, sans qu’ils aient droit à la maladie ni au chômage, en leur faisant enchaîner des dizaines de CDD ?

Cela résulte de choix politiques contre lesquels il serait difficile de s’élever – porter 80 % d’une classe d’âge au bac, 60 % à la licence – mais réalisés à budget contraint. Comme il faut tout de même fournir des profs à tous ces nouveaux ét

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